Une usine qui ferme dans les Vosges, tout le monde s'en fout.
Une centaine de types qui se retrouvent sur le carreau, chômage, RSA, le petit dernier qui n'ira pas en colo cet été, un ou deux reportages sur le 19/20 régional et puis basta.
Sauf que les usines sont pleines de types dangereux n'ayant plus rien à perdre.
Comme Martel le syndicaliste qui planque ses tatouages, ou Bruce, le bodybuilder sous stéroïdes. Des types qui ont du temps et la mauvaise idée de kidnapper une fille sur les trottoirs de Strasbourg pour la revendre à deux caïds qui font la pluie et le beau temps entre Épinal et Nancy.
Une fille, un Colt .45, la neige, à partir de là, tout s'enchaîne.
Aux animaux la guerre, c'est le roman noir du déclassement, des petits Blancs qui savent désormais que leurs mômes ne feront pas mieux et qui vomissent d'un même mouvement les patrons, les Arabes, les riches, les assistés, la terre entière.
C'est l'histoire d'un monde qui finit. Avec une fille, un Colt 45, la neige.
Après un naufrage en Méditerranée, le célèbre duo d'enquêteurs que forment le chevalier de Volnay, commissaire aux morts étranges, et son père, le moine hérétique, est momentanément séparé. Tandis que le moine se retrouve prisonnier de l'île de la mystérieuse Calypso qui révère les dieux de l'Egypte ancienne, le chevalier de Volnay devient esclave au Caire ! Il y est retenu dans l'étrange demeure d'une princesse mamelouke et de ses trois suivantes orientales. Son père se précipite à son secours dès qu'il le peut, mais un double meurtre (ou un double suicide ?) a lieu dans la maison de la princesse... Choc de cultures et rencontre de l'Orient et de l'Occident dans l'Egypte colorée du Coran et des «Mille et une nuits »sont au menu de la huitième, et la plus dépaysante des enquêtes du commissaire aux morts étranges.
Février 1777, Hilarion quitte sa Provence pour retrouver la neige et le froid du palais de Versailles. Officiellement appelé à se reposer auprès du roi après une mission éprouvante, Hilarion ne tardera pas à retrouver son rôle de brillant investigateur. Les énigmes, à la cour, ne prennent pas de repos. Un faux suicidé tout près des appartements du roi jette le doute et la peur au sein des nobles dignitaires du pays. Hilarion est vite emporté dans la tourmente des libelles injuriant la reine.
Paris, juillet 1777. Sollicité par Lenoir, lieutenant général de police, le chevalier Hilarion de S. doit répondre à une demande singulière du duc de Chartres, prince et libertin notoire : retrouver Suzanne, l'une de ses maîtresses, simple fille d'Opéra. Or, comme d'autres le seront après elle, elle a été assassinée. Les victimes sont découvertes dans des mises en scène esthétisantes, semblables à des tableaux, où les femmes sont amputées des mains et les hommes émasculés. Et l'on trouve, près des cadavres, une brochure clandestine interdite quelques mois plus tôt : Le Plan de l'Apocalypse. Commence alors une enquête, menée tambour battant par Hilarion, qui va se révéler très compliquée : mensonges, enchevêtrement d'intérêts, pistes multiples, intrigues imbriquées...
Le commissaire aux morts étranges et le moine hérétique ont trouvé refuge à Venise. Dans le palais où ils séjournent, de curieux évènements se produisent et nos enquêteurs croient déceler la nuit une présence suspecte. Mais de bien plus étranges événements se déroulent au dehors dans la cité d'ombres et de lumières. Des corps sont retrouvés vidés de leur sang. La population paniquée profane les cimetières pour brûler des corps après leur avoir percé le coeur. Y aurait-il des vampires à Venise ? Il faudra tout le sang-froid du chevalier de Volnay et le rationalisme du moine hérétique pour le découvrir.
Un Français ravagé par un deuil débarque à Atmore, Alabama, et va rôder autour de la prison, à l'écart de la ville. Est-il en quête de dépaysement, de sensations fortes, de vengeance ? Il s'installe chez l'habitant, commence à prendre des habitudes dans la bourgade et rencontre une jeune Mexicaine à la dérive qui semble la seule à pouvoir le comprendre. Un roman noir dense, ramassé, aiguisé.
Une jeune femme est retrouvée sauvagement assassinée dans les jardins du château de Versailles. Le commissaire aux morts étranges et son collaborateur le moine hérétique, de retour de Venise après une étape savoyarde (cf. Entretien avec le diable), entament une enquête sous la supervision directe de Louis XV et de la Pompadour. Une fois de plus, Olivier Barde-Cabuçon excelle à rendre tout le sel de l'époque, entre fascination de l'étrange, goût de la débauche et explosion des connaissances.
Au fin fond du Cantal, un homme venu de loin incendie la ferme dans laquelle il espérait voir un jour jouer ses enfants. Il rôde dans les bois et les gens du coin passent de la circonspection à la franche hostilité, sauf une jeune femme nouvellement arrivée qui le recueille. Mais personne n'est le bienvenu s'il n'est pas né ici. Roman noir, fable sociale, western rural, un premier roman âpre et sauvage à la tension sourde... Il faut se méfier de la terre qui dort.
1759. Une femme sans visage est retrouvée dans Paris. Volnay, le commissaire aux morts étranges, se charge de l'enquête. Surveillé de près par Sartine, qui voit d'un mauvais oeil ce policier hors normes, Volnay, secondé par un moine étrange et Casanova lui-même, remonte la piste d'un crime qui pourrait impliquer la Pompadour et Louis XV. L'épisode inaugural d'une série policière historique extrêmement prometteuse.
Après avoir sauvé Louis XV de la mort lors de l'attentat de Damiens, et malgré son peu de goût pour la monarchie, le jeune Volnay obtient du roi la charge de "commissaire aux morts étranges" dans la police parisienne. Aidé d'un moine aussi savant qu'hérétique et d'une pie qui parle, Volnay apparaît comme le précurseur de la police scientifique, appelé à élucider les meurtres les plus horribles ou les plus inexpliqués de son époque. Epris de justice, c'est aussi un homme au passé chargé de mystère, en révolte contre la société et son monarque qu'il hait profondément.
Lorsque, en 1759, le cadavre d'une femme sans visage est retrouvé dans Paris, Volnay doit conduire une enquête sur le fil du rasoir avant que le meurtrier ne frappe de nouveau. Surveillé de près par Sartine, le redoutable chef de la police qui voit d'un mauvais oeil ce policier hors normes, Volnay, aidé à cette occasion par le libertin Casanova en personne et une jeune aristocrate italienne tournée vers les sciences et le progrès, remonte la piste d'un crime qui pourrait impliquer la Pompadour et Louis XV lui-même. Mais entre des alliés incertains et des adversaires redoutables, à qui le commissaire aux morts étranges peut-il se fier ?
Des intrigues de la Cour de Versailles à la mystérieuse maison du Parc-aux-Cerfs, Casanova et la femme sans visage restitue avec une stupéfiante justesse, dans l'atmosphère si particulière de l'époque, les étonnants personnages que sont Louis XV, la marquise de Pompadour, Casanova et la figure énigmatique du comte de Saint-Germain, et inaugure une série policière des plus prometteuses.
Une jeune fille possédée par le diable, des villageois qui meurent chaque jour, une abbaye hantée depuis la mort de son abbé, une mystérieuse Dame blanche errant dans la forêt. Le mal aurait-il envahi cette vallée perdue de Savoie ? Et qui est cette jeune fille à la capuche rouge qui semble ne pas avoir peur du loup ?
Sur le chemin qui les ramène de Venise à Paris, le commissaire aux morts étranges et son père vont profiter de leur étape dans ce lieu insolite et reculé pour opposer les préceptes de la raison aux manifestations de l'inexplicable. Temporairement aveugle, le chevalier de Volnay doit s'en remettre à l'ingénue Violetta et à ses sens exacerbés par la tension ambiante. Son père, quant à lui, cache tant bien que mal son excitation sous sa robe de bure : car quoi de plus tentant, pour un moine hérétique, que de s'entretenir avec le diable lui-même ?
Quelque part entre L'Exorciste, Le Nom de la rose et Le Petit Chaperon rouge, Entretien avec le diable est sans conteste le volet le plus détonnant dans la série du commissaire aux morts étranges.
Des pendus qui se balancent sous les ponts de Venise comme autant de fleurs au vent, un comte que l'on a fait le pari d'assassiner dans son palazzio. Autant de raisons pour que Volnay, le commissaire aux morts étranges, quitte Paris et réponde à l'appel au secours de Chiara, son ancien amour. Il espère aussi, par ce voyage, chasser l'humeur noire de son assistant, le moine hérétique, plongé dans une profonde dépression.
Mais, dans la Venise du XVIIIe siècle qui agonise lentement en s'oubliant dans de splendides fêtes, les rencontres et les événements ruissellent d'imprévus. Une jeune fille travestie en garçon, un auteur de théâtre, un procurateur de Saint-Marc manipulateur et son énigmatique fille entament le plus sombre des bals masqués.
Entre rêve et réalité, tragédie et comédie, Volnay et le moine se retrouvent confrontés à des assassins non moins qu'à leurs démons. Avec cette quatrième enquête du commissaire aux morts étranges en forme de parenthèse vénitienne, Olivier Barde-Cabuçon délaisse le temps d'un roman le royaume de l'intrigue pour la ville des masques.
Une nuit pas très paisible de 1749 dans un cimetière parisien... Le corps d'une jeune fille est retrouvé sur une tombe, sans doute sacrifiée lors d'un rituel sataniste. Pas de suspect et pour seuls indices : une hostie, un crucifix et cinq empreintes de pas. Sartine, le lieutenant général de police, craint une résurgence des messes noires sous le règne du très contesté Louis XV... Toujours aussi mal vus du pouvoir en place, le commissaire aux morts étranges et son non moins étrange compagnon, le moine hérétique, explorent la part d'ombre du siècle des Lumières.
Trois hommes sont retrouvés égorgés et la langue arrachée avant la Noël à Paris. Au même moment, des inconnus veulent ressusciter la fête des Fous, des convulsionnaires se roulent sur le sol des églises et une jeune fille pousse des cris d'oiseau. Mais que vient faire là-dedans le mystérieux chevalier d'Eon, peut-être membre du Secret du roi ? En quelques jours, l'ordre social semble s'inverser et même le moine semble gagné par la folie ambiante. Le commissaire aux morts étranges, lui, garde la tête froide et mène l'enquête.
Des lions se sont mystérieusement échappés d'une ménagerie et menacent les autres animaux de semer la terreur dans Paris.
Pour déjouer leur menace, le Conseil des animaux décide de faire appel à Karka, le vieux corbeau chargé des missions délicates. Une fable noire époustouflante. Sur la troisième branche d'un févier du parc Montsouris, le long des pentes de la voie ferrée désaffectée, vit en ermite Karka, le Corbeau Freux. Revêche et solitaire depuis qu'un Faucon Gerfaut brisa son aile et que tous l'abandonnèrent, Karka fuit les Pies bavardes et les Canards pompeux du parc, qu'il ne quitte guère.
A la seule Ierk, la Mouette démazoutée, il confie sa mélancolie et les amères réflexions que lui inspire l'instinct animal, jusqu'au jour où la rumeur de la disparition des Bêtes du Bois de Boulogne franchit les grilles du parc, portée par les Oiseaux migrateurs. Krarok, le Grand Corbeau du Conseil des Animaux de Paris, se décide alors à faire mander Karka, après toutes ces années. Dans la charpente du toit de Notre-Dame, où Krarok tient audience sous l'Aigle de Saint-Jean, ont lieu les retrouvailles et la révélation : il se dit que des Lions ont investi les Bois de Paris ! L'unique loi du Conseil ordonne aux Animaux de ne pas s'attaquer aux Humains : les Lions viennent d'en dévorer un. Karka, l'ancien messager oublié de tous les Conseillers, doit enquêter.
Naturellement, les investigations débutent à la Ménagerie du Jardin des Plantes, où le Lion Léon, le roi des Animaux décrépit et dément, ne lui apprend que sa terreur des usurpateurs. La disparition de Pfurr, le Matou du gardien, et le Chat de Gouttière qui fait basculer dans la fosse le cercueil à l'enterrement de l'Humain mettent Karka sur la piste d'un complot de Félins. Les Siamois qui enquêtent officiellement pour le Conseil ont quant à eux une autre théorie : les Chiens réclament depuis longtemps la création d'une milice canine pour imposer leur loi, la menace de ces Lions que personne n'a vus leur fournirait un excellent prétexte.
Lorsqu'une nuit, les Chiens indignés par l'accusation envoient au massacre une meute de Molosses dans le Bois, Karka perd le fil de son enquête, d'autant que la maladie emporte Krarok, que la Colombe qui était désormais son messager joue les agents doubles et que Karka ne peut compter que sur l'aide d'un Toucan Toco fantasque qu'il a libéré de sa cage. Avec Mélancolie des corbeaux, son premier roman à paraître en «Actes noirs», Sébastien Rutés compose une variation étrange et envoûtante sur le roman d'investigation, à mi-chemin entre la fable animalière et le conte philosophique.
Le commissaire Blandin est fatigué en ce matin de juin où sa femme le quitte. Alors qu'il débarque sur une affaire banale, la victime - une jeune femme - le plonge dans le passé de si forte manière qu'il décide de prendre les choses au sérieux. Mais très vite le rapport du médecin légiste clôt le dossier, mort naturelle, affaire classée. Blandin, persuadé du contraire, va mener l'enquête de son côté. Il pose ses congés, file à Bordeaux puis Paris, Pigalle, ses boîtes, ses bars de nuit, et bien au-delà...
Où la résolution d'une énigme criminelle va entraîner le Baron, flic marseillais, personnage fétiche de l'auteur, dans le monde du trafic des arts premiers de Marseille à la Nouvelle-Guinée. Mystères séculaires et horizons lointains nourrissent ce polar ambitieux qui revisite au passage les textes sur les sociétés primitives de Freud, Lévi-Strauss et Margaret Mead.
Frank Doornen, militaire en convalescence, parcourt sans relâche les sombres dédales d'une Flandre poisseuse pour retrouver Lies, fille fragile qui semble échouée entre les pattes d'un mafieux local. Le nouveau roman de Caroline De Mulder s'installe dans les décombres d'une société à la marge cherchant une issue radicalisée pour survivre. Mais le conte va virer macabre pour ces âmes perdues.
Anne Boher, la très sérieuse et réputée légiste de la morgue de l'hôpital de Strasbourg, est harcelée et acculée, au bord du gouffre. Lettres anonymes et poupées ensanglantées déposées à son domicile sont sur le point de la rendre folle. Qui lui en veut ? Pour quelles raisons ? Serait-ce lié à sa volonté de demander l'exhumation des corps des victimes du fou de Blauelsand, affaire pourtant brillamment résolue, grâce à elle, deux ans plus tôt ? Y a-t-il un rapport avec le dossier 242 ? la maladie de sa mère ?
Son amie Laure Bellanger, psychologue, et Franck Alber - tini, un ancien flic tourmenté, tentent de voler à son se cours. De son côté, Enzo Marquèz, l'assistant de la légiste, cherche ce mystérieux dossier dans les labyrinthiques archives de l'hôpital, un lieu sur lequel courent d'étranges rumeurs parlant d'expériences médicales.
En toile de fond, la canicule sévit, la capitale alsacienne connaît un été effroyable. L'hôpital est débordé, les décès se multiplient, la morgue est saturée. Les citoyens volontaires, militants d'un ordre nouveau, veillent tandis que dans l'atmosphère saturée de la ville, jaillis de nulle part, retentissent les grands airs de La Traviata.
Un banal cambriolage amène les citoyens du lotissement des Fleurs à s'organiser en patrouilles de vigilance pour venir «en aide à la police». Chaque soir, à bord de leur véhicule, Henri et Robert surveillent des rues où il ne se passe rien. Ils en profitent pour commenter leurs vies et celles de leurs voisins :
Denis Lassalle, ex-militaire, Régis Weiss, seul opposant aux milices, les frères Sauter, les Durant et quelques autres, trop tôt disparus. Henri, déprimé par le départ de sa femme, re - prend goût à l'existence au contact d'un Robert aux théories imparables du genre : «Si ce gars était là sans raison, c'est qu'il était là pour de mauvaises raisons.» Jusqu'au soir où un cadavre perturbe la tournée des vigiles amateurs. Pour ne pas troubler la tranquillité du quartier, les deux hommes se débarrassent du gêneur. Le lendemain, un patrouilleur est porté disparu. Puis, c'est au tour de Robert de se volatiliser. Henri va devoir chercher une explication et, comme le lui conseillait sa femme, se décider «à mettre un pied devant l'autre».
Parce qu'ils ont oublié que pour vivre en paix dans le lotissement des Fleurs il y a des règles à respecter, certains de ses habitants y demeureront pour l'éternité.
Avec une écriture maîtrisée et un humour caustique, Pas - cale Fonteneau observe les individus dans leur médiocrité, les petits compromis du quotidien et leurs grandes conséquences.
Nouveau volet des aventures de la commissaire Régine Partouche. Une enquête sur deux meurtres : un travesti et une peintre. Le premier la mène à un lupanar fréquenté par les hommes politiques et le second, en Allemagne, sur les traces d'un fabricant d'incinérateurs. Un polar cérébral et nerveux servi par une écriture maîtrisée.
L'intrigue imaginée par Dmitri Stakhov s'appuie sur une hypothèse qui inverse cause et conséquence : les personnages politiques qui disparaissent des photos officielles au gré des purges successives au sein de l'appareil du Parti seraient en réalité les victimes du scalpel du retoucheur chargé du travail.
Le fait même d'effacer leur silhouette des négatifs (le support du négatif est un élément important de la narration, car il constitue le mode opératoire utilisé à l'époque de l'urss comme à l'époque contemporaine) entraîne à court terme leur disparition effective ! Le narrateur, un jeune photographe, en réalité assez antipathique, découvre par hasard qu'il a hérité de son père, ancien membre du KGB et retoucheur officiel, ce singulier et fatal don d'escamotage.
De mystérieux agents ont résolu d'utiliser ses compétences pour éliminer un opposant politique gênant. Pour ce faire, ils placent sur son chemin une jeune femme, parfait sosie de son amour de jeunesse, morte accidentellement au cours d'une rixe. D'autres encore le recherchent pour régler leurs comptes avec d'anciens associés. L'ensemble du récit s'articule autour de ces deux éléments : la mort accidentelle de la jeune fille, assassinée par maladresse par le narrateur lui-même, et la découverte progressive du complot et de la manipulation dont il fait l'objet en accomplissant des meurtres de sang-froid, en réalité commandités.
La narration tout entière est placée sous le signe de la confusion. Confusion mentale d'abord, due aux excès d'alcool, à la fatigue, aux événements étranges et tragiques qui se succèdent. Confusion chronologique ensuite, la plupart des épisodes clefs étant rapportés à l'avance, à la manière de projections imaginaires auxquelles le héros s'appliquerait ensuite à donner réalité. Au flash-back initial, très banal dans une histoire policière, succède ainsi une série de «flash-forward» assez déstabilisants pour le lecteur, et qui entretiennent un suspense singulier.
La tension est encore renforcée par le fait que le narrateur pose sur le monde un oeil de photographe : ce qu'il voit est décrit comme une succession d'instantanés, de plans plus ou moins larges, plus ou moins rapprochés, et forcément parcellaires. Le lecteur est ainsi plongé dans un monde morcelé qui le tient en alerte permanente. A cette narration résolument originale qui fonctionne comme un jeu de poupées russes, s'ajoutent tous les ingrédients récurrents du polar russe contemporain, nourri de l'actualité brûlante et qui ont récemment fait l'objet de révélations par Wikileaks : la corruption jusqu'aux plus hauts échelons du pouvoir, le trésor disparu du Parti communiste, les gangsters et les règlements de compte sanglants, un personnage féminin à la fois victime et bourreau, le tout faisant du Retoucheur un thriller au suspense haletant qui transcende magistralement les limites du genre.
Un soir de mai 2005, à Villeneuve-Saint-Maur, sur l'avenue qui sépare le lycée Ravel de la cité Presov, une jeune fille disparaît. Un groupe de policiers est chargé de l'enquête, et découvre le quotidien de l'adolescente : sa tour HLM, la chambre qu'elle partage avec son petit frère, son blog, ses strings. Et son bulletin de notes : "Trimestre catastrophique. Passage inenvisageable." Où est Déborah ? Sa mère pense à une énième fugue, une escapade en amoureux. Avec qui ? Un camarade casquette-capuche qui passe ses après-midis sur les terrains de basket ? Un plus vieux, pour la voiture ? Ou ce prof qu'elle retrouve, seul, à la fin des cours ?
Dans la même tour, quelques étages au-dessus, ou en dessous, Lila veut s'en sortir : bosser, passer son bac, vivre sa vie. Fuir la cité, aussi, et ressembler un peu à Mme Castelli, sa prof de français au regard tranchant. Pas facile, avec le bruit des voisins et son petit frère qui la surveille constamment. Il faut dire que depuis qu'il s'est fait virer de son sport-études, Hicham a du temps libre. Et ce n'est pas le collège qui l'épuise.
Chez les flics, l'ambiance est morose : Arénas veut être promu commissaire et bosse les cours du soir quand sa femme et son fils sont au lit. Sans conviction. Dorothée et Bonnal s'écharpent à chaque rencontre. Et le patron, bien sûr, lui, veut du chiffre. En plus, il pleut dans les bureaux, il va falloir des travaux.
Derrière les vitres de l'appartement, de la classe ou du commissariat, la ville s'étend. Le supermarché, la cimenterie, la médiathèque. L'oiseau-pylône qui couvre de son ombre métallique les allées de la cité. Plus loin, les mailles du fleuve, les berges folles, une péniche qui passe, parfois.
Plus loin encore, Paris. Mais personne ne passe jamais le pont.
Avec ce premier roman, Hervé Decca signe un polar vif et désespéré.