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Venu d'ailleurs, Harry Haller, surnommé Le Loup des steppes, s?installe dans une ville européenne des années vingt pour se consacrer à de vagues travaux littéraires. Très vite, son existence tranquille se lézarde. Profondément déprimé, hostile au monde moderne, en révolte contre la société bourgeoise mais attiré par le confort et l'ordre, il flirte avec l'idée du suicide. Sa rencontre avec une prostituée lui redonne goût à la vie. Avec quelques personnages de son monde interlope, elle semble lui offrir la possibilité de réconcilier les deux extrêmes de son être : son côté loup solitaire, ascète et antisocial, et sa faim de sensualité. Si le conflit de personnalité de Harry (alter ego de Hermann Hesse) n'est sans doute pas résolu à la fin du roman, son monde se transforme, le temps d'une hallucination, en un extraordinaire théâtre magique. Expérience spirituelle, récit initiatique, délire de psychopathe, Le Loup de steppes multiplie les registres. Salué à sa parution en 1927 (entre autres par Thomas Mann, qui déclare : Ce livre m'a réappris à lire), interdit sous le régime nazi, roman culte des années soixante et soixante-dix, c'est une des oeuvres phares de la littérature universelle du XXe siècle. Il méritait une nouvelle traduction. Le voici enfin rendu avec tout l'éclat de ses fulgurances, la troublante obscurité de ses zones d'ombre.
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Hermann Hesse (1877-1962) n'est pas seulement le célèbre auteur de Siddharta, du Loup des Steppes et d'autres chefs-d'oeuvre de la littérature allemande.
C'était aussi un immense lecteur, un bibliophile extraordinaire. Vivant dans le commerce intime d'ouvrages rares ou bon marché, issus de toutes les cultures, de toutes les époques il dresse ici pour nous le catalogue d'une bibliothèque de littératures universelle, et nous fait partager ses découvertes, ses joies et ses amours.
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"Je ne saurais évoquer en des termes plus heureux toutes les heures de mon existence au cours desquelles, oublié du monde, j'ai joui d'un bref repos, tous les instants de bonheur inattendu ou d'amour libéré du désir qui me faisaient perdre la notion du temps qu'en les comparant à cette verdoyante image de mon enfance. Et j'ai le même sentiment à propos de toutes les choses que, ma vie durant, j'ai aimées et souhaitées pour mon délassement et ma plus haute jouissance, toutes les traversées de villages inconnus, toutes les soirées où je comptais les étoiles, toutes les heures passées étendu à l'ombre des feuillages, toutes mes conversations avec les arbres, les nuages et les enfants."Les cinq nouvelles réunies ici ont été écrites au cours d'une longue période, entre 1896 et 1949. Elle reflètent l'interminable quête de l'homme à la recherche de sa vérité, "les besoins impérieux de saisir les choses dans leur ensemble, d'en discerner les causes, la nostalgie d'un monde harmonieux et d'une certitude spirituelle".
Du jeu de miroirs avec la nature de "Mon enfance " à l'amour des livres dans "Histoire de mon Novalis", de la conscience sociale du "Mendiant" aux premières amitiés de "Mon camarade Martin" et "La Leçon interrompue", Hesse explore ses années d'apprentisssage avec une sensibilité inégalée. -
ROMANS
Peter Camenzind / L'Ornière
Rosshalde / Knulp / Demian
Le Dernier Eté de Klingsor / Siddhartha
Enfance d'un magicien
Le Loup des steppes / Narcisse et Goldmund
Le Voyage en Orient
Le Jeu des Perles de Verre
Edition sous la direction de Jean-Louis Bandet. -
C'en est trop ; poèmes 1892-1962
Hermann Hesse
- Bruno Doucey
- En Resistance
- 17 Janvier 2019
- 9782362291999
Hermann Hesse n'est pas seulement l'auteur de romans mondialement connus. Il a aussi livré une oeuvre poétique majeure que cette publication nous invite à (re)découvrir. Les textes de jeunesse témoignent de sa difficulté à vivre et de sa révolte contre un milieu familial piétiste. Puis viennent la dénonciation des ravages de la Première Guerre mondiale et l'évocation du mal fait aux hommes. En fait, l'existence entière entre dans les poèmes de cet homme : les crises personnelles et le suivi psychothérapique, la peinture et la beauté du monde, l'exil et le rejet du nazisme, les voyages en Inde, l'amour et ses déchirements... En 70 ans d'écriture, le poète s'est mis à nu pour montrer le quotidien d'un homme, ses joies et ses peines, ses révoltes, son désir profond d'un monde meilleur.
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Toute sa vie, dès le succès de ses premiers livres (Peter Camenzind en 1903 et L'Ornière en 1904), Hermann Hesse a reçu un très abondant courrier de la part ses lecteurs. Au fil des années, la masse des lettres ne cessa d'augmenter, jusqu'à atteindre des sommets inégalés après que le Prix Nobel de littérature lui eut été décerné en 1946. L'écrivain, parfois accablé par cette marée épistolaire, ne la traita pourtant jamais avec désinvolture, mais s'attacha toujours à répondre à ceux de ses correspondants dont il ressentait que la détresse était sincère, et la demande de secours moral justifiée. Plus des deux tiers des lettres, en effet, provenaient d'adolescents ou de jeunes gens qui prenaient l'écrivain pour confident de leurs doutes parce qu'ils avaient perçu dans ses livres l'importance de la quête de sagesse. A quinze ans, en 1892, le jeune Hermann Hesse avait fait une tentative de suicide. Il avait été un adolescent rebelle, toujours en conflit avec sa famille. Il était donc bien placé pour comprendre la fragilité de la jeunesse. En outre, son esprit profondément chrétien le portait à répondre aux appels qui lui étaient lancés par des esprits encore en formation. Il refusa pourtant jusqu'au bout d'être pris pour un gourou ou un oracle, et ses conseils de vie sont d'autant plus précieux qu'ils ne lui sont dictés que par son immense culture et sa grande expérience. Dans la masse très abondante de la correspondance de Hesse, le présent livre propose une anthologie des lettres les plus remarquables écrites en réponse à ces appels. On y voit Hermann Hesse affirmer ses convictions profondes, surtout dans les moments les plus tragiques de l'histoire européenne. S'il se montrer parfois sévère avec certains interlocuteurs, il est le plus souvent secourable et plein de bonté. Ce livre trace ainsi un autoportrait saisissant de l'un des plus grands écrivains allemands du vingtième siècle en même temps qu'il constitue une leçon de vie d'une brûlante actualité.
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Hermann Hesse poète ? Nous connaissons surtout en France le romancier du Loup des steppes, de Siddbartha, du Jeu des perles de verre, l'esprit non confirmiste, la pacifiste, l'exile Pourtant dans l'oeuvre immense de cette longue vie, la poésie est bien loin de n'occuper qu'une place secondaire Non seulement la Muse fut pour Hesse une compagne quasi-quotidienne, non seulement les vers réunis par son éditeur, après sa mort, occupent deux forts volumes, mais il demeure, en dépit des esthètes qui le jugèrent souvent trop simple, trop naïf, l'un des plus lus, des plus populaires parmi les poètes allemands contemporains.
C'est en poète plus qu'en romancier que Hesse se considérait lui-même Une épitaphe de fantaisie figurant dans un carnet qu'il tenait vers sa trentième année l'indique clairement :«Ci-git le poète lyrique H Sans doute ne fut-il jamais reconnu comme tel. mais il fut grandement surestimé, en revanche, comme écrivain récréatif.» Assurément, Hesse n'a pas renouvelé l'instrument poétique, n'a pas créé d'école Bien au contraire, il s'est volontairement inscrit dans la lignée des romantiques allemands qu'il relisait sans cesse avec prédilection. en vers comme en prose,savourant chez eux l'admirable musicalité de la langue, la délicatesse des sentiments, l'amour sincère de la nature, l'ouverture sur le rêve, la participation enthousiaste aux royaumes de l'histoire et de la légende,et au-delà de ceux-ci, à l'inconscient collectif.
Pour présenter le poète Hesse au lecteur français, il a semblé raisonnable de se restreindre, de choisir parmi les quelques 700 poèmes publiés en 1962 en Allemagne, ceux qui sont à la fois représentatifs de la manière Hesse, les plus populaires dans les pays de langue allemande et les plus accessibles à notre public dans une version française. C'est la matière d'un ou deux recueils que l'on trouvera ici (environ 80 poèmes), mais le choix s'étend sur toute une vie et suit à peu près, comme les éditions allemandes, l'ordre chronologique.
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Ce livre réunit des textes de Hermann Hesse sur la musique, tirés, les uns de ses oeuvres en prose ou en vers, d'autres, les plus nombreux, d'inédits et notamment de sa riche correspondance. La musique fut bien plus pour Hesse que la peinture - chez lui simple passe-temps d'amateur éclairé. Elle a illuminé sa vie, guidé à chaque instant son inspiration et son style. Il l'a toujours considérée comme le plus pur symbole de la culture humaine, la plus haute réalité métaphysique, l'axe véritable de l'univers. Amie d'enfance, passion de jeunesse, fidèle compagne de son âge mûr et de sa vieillesse, elle est le personnage central d'un roman d'amour dont cet ouvrage nous livre les documents, nous raconte l'histoire - l'histoire d'une passion :
"Que serait notre vie sans la musique ! (...) Si l'on interdisait, à moi-même ou à quelque autre demi-amateur de musique, disons les chorals de Bach, les arias de La Flûte Enchantée ou de Figaro, ou qu'on les arrachât de vive force à notre mémoire, cela représenterait autant pour nous que la perte d'un organe, de la moitié d'un sens, d'un sens tout entier.
Au fil des pages, nous découvrons ainsi les préférences attendues (Mozart, Bach, Haendel), inattendues (Schoeck, Clara Haskill) de Hesse, comme aussi, ses bêtes noires (Wagner, Strauss).
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Les écrits de Hermann Hesse sur la littérature ont été rassemblés par le second fils de l'écrivain, Heiner Hesse, et édités en deux volumes en 1970. Parti à la recherche des articles publiés par son père sur une période qui s'étend de 1900 à sa mort, en 1962, il découvrit dans une soixantaine de journaux et revues plus de 3000 contributions consacrées à la littérature et n'en retint qu'un dixième.
L'image que l'on avait en Allemagne d'un Hermann Hesse solitaire et vivant hors du temps, évitant toute forme de relation avec ses contemporains, va s'en trouver bouleversée. Pendant une soixantaine d'années Hermann Hesse prend une part très active à la vie littéraire de son temps. Exerçant ce qu'il a appelé lui-même une "critique positive" ou une "critique par amour", il observe, recense, éclaire, explique, se donne pour tâche de faire lire, ne s'intéresse qu'à des écrivains et des oeuvres dont il peut se sentir, sur le plan spirituel et artistique, solidaire.
L'autre image que ces textes vont détruire est celle d'un "romantique de la troisième génération" qui persisterait à camper sur ses positions, à ignorer les tentatives et les recherches, sur le plan littéraire, les plus audacieuses de son temps. Il n'est pour s'en persuader que de lire l'article que Hermann Hesse consacre à l'Expressionnisme ou l'amusant dialogue platonicien qui traite de la Nouvelle tonalité. Par ailleurs, les choix de l'écrivain font preuve d'une toujours très grande liberté de jugement et d'un éclectisme jamais démenti avec le temps.
On ne peut, en définitive, que s'étonner devant l'extraordinaire activité du lecteur que fut Hermann Hesse ! Il semble avoir tout lu de ce qui s'est publié de littérature allemande ou traduite en allemand pendant plus de soixante ans. Et en dépit de toutes les épreuves rencontrées, de tous les revers essuyés au cours de sa vie d'écrivain, Hermann Hesse n'a jamais perdu sa foi dans le livre et c'est une véritable leçon d'humilité et de courage qu'il donne, dans ces pages, à d'autres lecteurs, tentés comme lui, au détour du chemin, de renoncer : "Nous n'avons pas l'intention de déplorer que le livre ait pratiquement renoncé à ses privilèges d'antan et que, tout récemment, aux yeux des masses, il ait perdu, semble-t-il, à cause du cinéma et de la radio, de sa valeur et de sa force d'attraction. Nous n'avons néanmoins pas à craindre une destruction future, au contraire : avec le temps, plus certains besoins de distraction et besoins d'instruction populaire seront satisfaits grâce à d'autres inventions, plus le livre recouvrera de dignité et d'autorité. Car l'idée que l'écrit et le livre ont des fonctions éternelles supplantera bientôt la griserie du progrès la plus infantile. Il apparaîtra que la formulation par le mot et la transmission de ces formulations par l'écriture, ne sont pas que des auxiliaires importants, mais sont surtout l'unique moyen grâce auquel l'humanité peut accéder à une histoire et à une conscience durable de soi."
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Dès sa jeunesse, Hermann Hesse a été hanté par les questions portant sur la spiritualité. Il n'a cessé tout au long de sa vie d'aborder ce sujet non seulement dans ses romans et ses nouvelles, mais aussi à travers de nombreux articles et conférences, dans ses poèmes, ainsi que dans sa correspondance.
Ce sont ces prises de position publiques ou privées que Siegfried Unseld, qui fut son ami, son éditeur chez Suhrkamp et l'un des meilleurs connaisseurs de son oeuvre, a entrepris de réunir dans le présent livre, quelques années après la mort de Hermann Hesse. Cet ouvrage capital, qui éclaire et complète l'oeuvre romanesque, n'avait encore jamais été traduit en français.
On y découvre un précurseur dans la connaissance des spiritualités de l'Extrême-Orient, guettant la parution des traductions qui permirent enfin au public allemand de les découvrir, mettant en garde ses lecteurs contre la mode superficielle du zen en Europe, mais décelant aussi dans la curiosité nouvelle pour les traditions extra-européennes le signe d'un très profond besoin de renouvellement des traditions religieuses.
Élevé dans une foi protestante d'inspiration piétiste, attaché au message chrétien mais profond connaisseur du bouddhisme, Hesse cherche un point de convergence entre les grands courants spirituels avec le sentiment qu'il est urgent de répondre à la crise morale de l'Occident. S'il est vrai que cette crise n'a fait que se confirmer depuis lors, son message est, plus que jamais, actuel.
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Ce recueil de textes est en quelque sorte le pendant de Magie du livre, mais son ambition est plus vaste puisque Hermann Hesse va ici des sources les plus anciennes de la littérature ou des textes sacrés (L 'épopée de (iilgamesh. Confucius, par exemple) jusqu'à scs contemporains.
Ix classement chronologique des essais nous offre un témoignage impressionnant du grand érudit qu'il fut - à la fois par sa curiosité et l'étendue de ses lectures. A des analyses longues et fouillées (Goethe, Novalis, Dostoïevski, Kafka) s'ajoutent des notes plus brèves (Maître lickart. Defoe, Sterne. Schopenhauer), souvent éclairantes, toujours intuitives.
La liste serait trop longue, mais, outre les écrivains déjà cités, nous traversons les siècles de la littérature universelle à travers, notamment : Plutarque, Boccacc. Rabelais. Swift. Voltaire. Casanova. Schiller. Hölderlin. Pouchkine. Dumas. Hugo, Poe, Marx, Klauben. Ibsen, Tolstoï, Freud. Verlaine. Gide. Proust, Mann. Musil. Lawrence, Huxley. Roth, Jünger. Hemingway. Green.
Parallèlement, nous publierons les Carnets indiens : les lecteurs français disposeront ainsi d'un ensemble significatif du Hermann Hesse voyageur, poète et penseur.
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La publication de lettres écrites par Hermann Hesse entre 1900 et 1962 montre sous un jour intime cette grande figure de la littérature germanique.
Qu'il s'adresse à des personnalités telles que Stefan Zweig, Romain Rolland, Thomas Mann, C.G. Jung, Martin Buber ou André Gide ; à de simples relations ou aux êtres jeunes qu'il a profondément influencés, Hermann Hesse nous donne de lui, en cette période où l'Allemagne est successivement engagée dans deux guerres, le portrait d'un homme profondément épris d'individualisme, déchiré par des débats intérieurs et révolté par ces conflits.
Un des privilèges que procure ce livre est de permettre au lecteur de passer, pour ce qui est des guerres, du côté de l'adversaire.
Rien n'éclaire mieux, pour nous, la réalité du double drame.
D'autant que Hermann Hesse, naturalisé suisse en 1923, s'il est allemand d'origine et de culture, s'est opposé tant au gouvernement impérial qu'au régime hitlérien.
Le tableau exact et désespéré qu'il fait de l'Allemagne après 1914-1918 est bouleversant.
Hermann Hesse « hors parti », « apolitique jusqu'au fanatisme », ennemi irréductible de toute dictature, trouve, malgré ses souffrances morales, son salut grâce à la création littéraire et à ses affinités avec la nature. -
Hermann hesse publia gedenkblätter (feuillets d'album) en 1937, deux ans après le suicide de son frère cadet.
Deux éditions successives, en 1950 et en 1984, vinrent compléter ce noyau de textes consacrés à ses amis et contemporains et aux membres de sa famille. en 1937, hermann hesse a 60 ans, il n'a plus rien à prouver sur le plan littéraire, son oeuvre romanesque est quasiment achevée, mais sur l'homme, la femme, l'enfant, l'ami, disparus, il va se livrer comme jamais. on retrouve dans son cercle rapproché des peintres (ernst morgenthaler, albert welti), des musiciens (othmar schoeck), des confrères estimés (romain rolland, andré gide, thomas mann, martin buber), des figures oubliées par le temps, un camarade d'école, un mécène, et surtout, son père, ses soeurs et son frère.
Ces textes dévoilent la sensibilité de l'homme, son sens profond de l'éthique et sa fidélité à des valeurs éternelles: le respect de la personne et de son originalité irremplaçable.
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Guerre et paix ; considérations politiques
Hermann Hesse
- L'Arche
- Tete-a-tete
- 2 Juin 2003
- 9782851815392
Ici sont publiées pour la première fois les interventions du romancier dans le domaine de la politique : de 1914 à sa mort en 1962, cet homme, qui détestait la politique, n'a cependant jamais renoncé à y faire entendre sa voix. Socialisme, communisme, république de Weimar, nazisme, antisémitisme, aucune des questions qui ont marqué au fer rouge le siècle dernier n'est passée sous silence.
Dans ce recueil, Hesse se présente d'abord comme un Allemand qui décide en 1914 de ne pas suivre sa patrie dans la guerre ; réfugié en Suisse, il ne cessera d'appeler à la fin du massacre. Le retrait est ainsi le geste fondateur de sa pratique de la politique, véritable péché originel aux yeux de nombre de ses concitoyens.
Hesse incarne la figure du grand écrivain qui, dans la tradition de Goethe, ne se mêle pas de politique, mais ne renonce certes pas à exercer un magistère spirituel et moral sur la communauté politique à laquelle il appartient. C'est enfin un intellectuel dont le jugement n'a jamais vacillé au cours des décennies. Alors que les temps y étaient propices, il n'a jamais changé de rôle ni de bord.
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En 1919, après la Première Guerre mondiale, Hermann Hesse s'installe au Tessin, espace de vie qu'il a découvert au début du siècle lors de ses fréquents voyages en Italie.
Cette période coïncide avec une crise personnelle : il vient de se séparer de sa femme et de ses enfants ; de surcroît, il est ruiné. Le Tessin sera la terre de la renaissance après le chaos, quand, installé dans un modeste appartement de la Casa Camuzzi, un palais baroque dont la vue plonge sur le lac de Lugano, il va écrire Le dernier Eté de Klingsor, ainsi que des textes sur la nature, la campagne et la vie tessinoises, qui forment le tissu de ce recueil.
L'artiste trouve une rare inspiration dans les paysages du Tessin du Sud, aux allures d'une campagne toscane abritée par les Alpes. Il plonge dans les lacs, observe un tournesol une heure durant et commence à peindre à l'aquarelle ce paysage lumineux. Observateur, contemplateur, mais surtout métaphysicien du paysage, Hermann Hesse livre ici une partie de son amour de la nature et de la culture ; c'est autant le poète que le conteur ou le philosophe qui s'exprime dans ces pages parues à l'époque dans de grands journaux ou revues germaniques.
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Encore jeunes, déjà célèbres et manifestement promis l'un et l'autre à un brillant avenir littéraire, Thomas Mann (1875-1955) et Hermann Hesse (1877-1962) firent connaissance en 1904 à Munich, hôtes tous deux de leur éditeur, S. Fischer. Espacée d'abord, puis plus régulière au fil des années, la correspondance qui s'engagea entre eux ne s'interrompit qu'avec la mort de Thomas Mann en 1955. Ce volume présente pour la première fois au lecteur français l'intégralité des lettres conservées ainsi que plusieurs documents en annexe qui, éclairant les arrière-plans historiques, idéologiques ou personnels de cette correspondance, permettent d'en apprécier précisément les enjeux.
Entre ces deux géants conscients de représenter chacun à sa façon une bonne part de ce que la tradition humaniste allemande pouvait avoir de plus précieux - comment ne pas évoquer là une autre amitié et une autre correspondance célèbres, celles de Goethe et de Schiller ? -, nous voyons s'approfondir l'attachement et l'estime au fur et à mesure que s'élèvent les édifices majestueux de leurs oeuvres parallèles.
Mais il y a autre chose : dans la guerre que la folie du siècle mène contre ces valeurs humanistes, Thomas Mann et Hermann Hesse se trouvent vite en première ligne, sommés par les évènements, qu'ils le veuillent ou non, de prendre clairement position. Entre Hesse qui a démissionné en 1930 de la section de littérature de l'Académie des arts de Prusse et T. Mann qui le presse en 1931 de s'y faire réélire, entre l'un qui refuse avec une constante intransigeance de se ranger dans un camp et l'autre qui, en 1936 et non sans avoir tergiversé, se solidarise enfin sans réserve avec l'émigration allemande, ce sont deux conceptions du rôle de l'écrivain, de la mission de l'intellectuel qui s'opposent souvent, mais se rejoignent aussi parfois, comme dans le jugement sans aménité que l'un et l'autre portent sur l'Allemagne occidentale d'après 1945.
Cet aspect-là aussi de l'échange entre Hermann Hesse et Thomas Mann retiendra sans doute l'attention du lecteur d'aujourd'hui.