Chaque semaine, retrouvez ICI et en librairie, la sélection des livres présentés dans l'émission présentée par Augustin Trapenard !
Ce mercredi 1er février 2023, à 21h00, sur France 5, Qu'est-ce qui fait un héros ? Histoires ordinaires ou hors du commun, cette semaine La Grande Librairie interroge des destins. Au programme : un tête-à-tête inédit entre Florence Aubenas et le Prix Nobel de Littérature Jean-Marie Gustave Le Clézio. Une interview exclusive de Paul Pavlowitch qui se fit passer pour Émile Ajar avec la complicité de Romain Gary. Et une rencontre exceptionnelle, au Festival international de la bande-dessinée d'Angoulême, avec le grand auteur de mangas Hajime Isayama, à qui l'on doit notamment L'Attaque des Titans.
C'est déjà en librairie et mercredi à la télé !
« On est le 6 décembre 2018, il est midi. Trois semaines que le mouvement a démarré, avec l'impression, ici, que tout ne fait que commencer ».
Qu'avons-nous traversé ces huit dernières années ?
De la révolte des Gilets jaunes à la vie quotidienne en Ukraine sous les bombes, en passant par le grand confinement, la virée en Thaïlande de deux cousins de région parisienne ou la fin tragique d'un éleveur tué par des gendarmes, Florence Aubenas raconte notre époque, au plus près du réel.
Florence Aubenas est grand reporter au journal Le Monde. Elle a notamment publié Le Quai de Ouistreham et L'Inconnu de la poste, qui ont connu un immense succès critique et public.
Pour moi, l'écriture est avant tout un moyen d'agir, une manière de diffuser des idées. Le sort que je réserve à mes personnages n'est guère enviable, parce que ce sont des indésirables, et mon objectif est de faire naître chez le lecteur un sentiment de révolte face à l'injustice de ce qui leur arrive.J. M. G. L. C.
Un événement : quarante ans après l'Affaire Ajar, le dernier témoin et protagoniste de cette légendaire invention littéraire, celui qu'on appelait Émile Ajar, prend la parole. Paul Pavlowitch, cousin de Romain Gary, se souvient de ceux qui ont partagé sa vie, les deux icônes Romain Gary et Jean Seberg. Il raconte le destin magnifique et terrible de ces deux personnalités extraordinaires. En toile de fond de cette vie intime, est dépeinte avec une grande précision documentaire, la seconde moitié du Vingtième siècle depuis la jeunesse de Gary et celle de Seberg, de la Lituanie aux États-Unis, période emplie de conflits armés, de répression puritaine et politique, de racisme mais aussi de liberté.
L'auteur fait revivre ces personnes tant aimées, parcourt sa mémoire et ses carnets de notes de toujours, rassemble les pièces de leurs existences et donne des clefs pour comprendre comment ces deux êtres d'exception ont tant brillé avant de disparaître tragiquement.
Un texte puissant littérairement qui célèbre le souvenir d'une « tribu » telle que la nommait Gary, une extraordinaire famille qui a bousculé l'histoire de la littérature française.
N'épargnant que l'île du Paradis, le Grand Terrassement poursuit son avancée, écrasant impitoyablement toute vie sur son passage, mais Armin, Mikasa et leurs compagnons savent quelle est la cible d'Eren. Ils le rattrapent enfin, et ne reculeront devant aucun sacrifice pour l'arrêter...
Dans ce livre, le premier qu'il consacre au racisme, Dany Laferrière se concentre sur ce qui est peut-être le plus important racisme du monde occidental, celui qui dévore les Etats-Unis. Les Noirs américains : 43 millions sur 332 millions d'habitants au total - plus que la population entière du Canada. 43 millions qui descendent tous de gens exploités et souvent martyrisés. 43 millions qui subissent encore souvent le racisme. Loin d'organiser une opposition manichéenne entre le noir et le blanc, précisément, Dany Laferrière précise : « On doit comprendre que le mot Noir ne renferme pas tous les Noirs, de même que le mot Blanc ne contient pas tous les Blancs. Ce n'est qu'avec les nuances qu'on peut avancer sur un terrain si miné. » Voici donc un livre de réflexion et de tact, un livre littéraire. Mêlant des formes brèves que l'on pourrait rapprocher des haïkus, où il aborde en général les sensations que les Noirs éprouvent, et de brefs essais où il étudie des questions plus générales, Dany Laferrière trace un chemin grave, sans jamais être démonstratif, dans la violence semble-t-il inextinguible du racisme américain. « Mépris », « Rage », « Ku Klux Klan » alternent avec des portraits des grands anciens, Noirs ou Blancs, qui ont agi en noir ou en blanc : Charles Lynch, l'inventeur du lynchage, mais aussi Eleanor Roosevelt ; et Frederick Douglass, et Harriet Beecher Stowe, l'auteur de La Case de l'oncle Tom, et Bessie Smith, à qui le livre est dédié, et Angela Davis. Ce Petit traité du racisme en Amérique s'achève sur une note d'espoir, celui que Dany Laferrière confie aux femmes. « Toni, Maya, Billie, Nina, allez les filles, le monde est à vous ! »
Sublime roman [...] Harlem Shuffle est un page turner comme Colson Whitehead sait si bien en faire. Livres HebdoPetites arnaques, embrouilles et lutte des classes... La fresque irrésistible du Harlem des années 1960.Époux aimant, père de famille attentionné et fils d'un homme de main lié à la pègre locale, Ray Carney, vendeur de meubles et d'électroménager à New York sur la 125e Rue, « n'est pas un voyou, tout juste un peu filou ». Jusqu'à ce que son cousin lui propose de cambrioler le célèbre Hôtel Theresa, surnommé le Waldorf de Harlem...Chink Montague, habile à manier le coupe-chou, Pepper, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, Miami Joe, gangster tout de violet vêtu, et autres flics véreux ou pornographes pyromanes composent le paysage de ce roman féroce et drôle. Mais son personnage principal est Harlem, haut lieu de la lutte pour les droits civiques, où la mort d'un adolescent noir, abattu par un policier blanc, déclencha en 1964 des émeutes préfigurant celles qui ont eu lieu à la mort de George Floyd.Avec Harlem Shuffle, qui revendique l'héritage de Chester Himes et Donald Westlake, Colson Whitehead se réinvente une fois encore en détournant les codes du roman noir. C'est vivant, bruyant, caracolant. C'est Whitehead. L'Obs Un réjouissant tourbillon [...] Une belle leçon d'histoire et d'humanité en mode thriller. Les Echos
Au coeur de l'Allemagne, l'International Tracing Service est le plus grand centre de documentation sur les persécutions nazies. La jeune Irène y trouve un emploi en 1990 et se découvre une vocation pour le travail d'investigation. Méticuleuse, obsessionnelle, elle se laisse happer par ses dossiers, au regret de son fils qu'elle élève seule depuis son divorce d'avec son mari allemand.
A l'automne 2016, Irène se voit confier une mission inédite : restituer les milliers d'objets dont le centre a hérité à la libération des camps. Un Pierrot de tissu terni, un médaillon, un mouchoir brodé... Chaque objet, même modeste, renferme ses secrets. Il faut retrouver la trace de son propriétaire déporté, afin de remettre à ses descendants le souvenir de leur parent. Au fil de ses enquêtes, Irène se heurte aux mystères du Centre et à son propre passé. Cherchant les disparus, elle rencontre ses contemporains qui la bouleversent et la guident, de Varsovie à Paris et Berlin, en passant par Thessalonique ou l'Argentine. Au bout du chemin, comment les vivants recevront-ils ces objets hantés ?
Le bureau d'éclaircissement des destins, c'est le fil qui unit ces trajectoires individuelles à la mémoire collective de l'Europe. Une fresque brillamment composée, d'une grande intensité émotionnelle, où Gaëlle Nohant donne toute la puissance de son talent.
« Il est tout blanc, d'un blanc spectral, taillé en Hermès. Privé de son socle, pour ainsi dire détrôné, il jouxte des artefacts faits de la même substance dure, compacte, quelque peu élimés par le temps, imprégnés de la même grandeur surannée. La vitrine expose une matière - l'ivoire - à travers ses multiples usages exhumés d'un grenier de grand-mère. Un chausse-pied, des coquetiers, des ronds de serviette, un coupe-papier, un bougeoir, des boules de billard, une brosse à cheveux, et au milieu de ce bric-à-brac de brocanteur, un roi avec sa barbe et ses médailles. Léopold II n'est plus qu'un bibelot parmi d'autres. »King Kasaï est le nom d'un éléphant empaillé qui fut longtemps le symbole du Musée royal de l'Afrique centrale, situé près de Bruxelles. C'est devant le « roi du Kasaï » et près d'un Léopold II à la gloire déboulonnée, dans cette ancienne vitrine du projet colonial belge aujourd'hui rebaptisée Africa Museum, que Christophe Boltanski passe la nuit. En partant sur les traces du chasseur qui participa à la vaste expédition zoologique du Musée et abattit l'éléphant en 1956, l'auteur s'aventure au coeur des plus violentes ténèbres, celles de notre mémoire.
Le chagrin conduit le coeur vers la littérature et la philosophie dans l'espoir d'y trouver une consolation, comme un enfant se réfugie dans les bras de sa mère. Mais les mots des autres ne consolent pas. Regarder la mort en face, n'est-ce pas constater notre condition d'êtres résolument inconsolables?Qu'est-ce que ça change, vraiment, de perdre son père? Sans croyance en un au-delà, que signifie l'ultime disparition de ce qui est? Rien ne change, et pourtant le monde n'est plus le même. Il faut s'habituer à vivre dans un monde sans lui. La vie continue, les matins se succèdent, les enfants grandissent, un nouveau chat rejoint la maison, et après la grande tristesse c'est la peur de l'oubli qui survient.Et si tout redevenait comme avant? La vie, même dans l'impossible face-à-face avec la mort, se trouve dans cette alternative:quand le temps s'étire, on s'ennuie; quand le temps s'arrête, on gémit. Le drame n'est-il qu'une suspension provisoire de nos soucis? Mais alors, nous autres, êtres inconsolables, avons-nous la possibilité de jouir de l'existence en connaissance de cause?A. V. R.
«C'était trop. Trop vite, trop tôt. Trop peu préparé à ce nouvel assaut de souffrance et de regrets. Trop de colère contre le destin. Trop de morts. Trop de prières et de miséricorde. Trop de Toussaint aux beaux jours. Trop de plus jamais.»En l'espace de six mois disparaissent successivement la mère et le frère de l'auteur. Tandis qu'ils affrontent la maladie surgit un secret qui réécrit l'histoire de la famille.
Les morts peuvent faire agir les vivants, mobiliser ceux qui restent autour de questions qui touchent à la vie collective, à l'érosion des liens sociaux, à des événements qui les dépassent ou dont l'ampleur ou la violence pourrait les détruire, annihiler ce à quoi ils sont attachés. Les morts peuvent aider les vivants à transformer le monde. Dans ce livre, Vinciane Despret nous raconte cinq histoires où des morts proches ou éloignés dans le temps ont obligé les vivants à leur donner une nouvelle place. Ces morts « insistent » parce qu'il y a eu quelque chose d'injuste dans le sort qui a été le leur : victimes de violence, commandos d'Afrique et de Provence, sacrifiés politiques à la raison du plus fort... Ceux qui restent ont décidé de répondre à cette insistance en commandant une oeuvre grâce à un protocole politique et artistique nommé le programme des Nouveaux Commanditaires. Ce protocole consiste à choisir un artiste et à décider en commun d'une oeuvre. Il va transformer en profondeur les commanditaires.
Cela n'a rien à voir avec le deuil dans sa forme autoritaire (quand les théories psychologiques enjoignent à l'oubli). C'est avec la vie, celle qui n'est plus mais qui est encore d'une autre manière, celle qui résiste à son effacement, que ce faire avec provoque une étonnante série de métamorphoses.
Mêlant le témoignage de Gabriele à ses propres réflexions, et utilisant comme toujours son humour et son sens de la formule, Amandine Dhée atteint l'objectif qu'elle s'était fixé : « écrire un livre réconfortant sur la mort ». L'occasion de réfléchir avec elle sur nos propres angoisses, sur notre désir de transmission, sur les pertes et les liens qui unissent les êtres et qui marquent les générations. Liant l'intime au politique, Sortir au jour est aussi un texte qui questionne nos façons de faire société... On pourrait lire Sortir au jour comme un texte qui parle de la perte, mais c'est exactement l'inverse. Sortir au jour raconte ce qui nous lie.
Après l'immense succès du Grand Monde Un ogre de béton, une vilaine chute dans l'escalier, le Salon des arts ménagers, une grossesse problématique, la miraculée du Charleville-Paris, la propreté des Françaises, « Savons du Levant, Savons des Gagnants », les lapins du laboratoire Delaveau, vingt mille francs de la main à la main, une affaire judiciaire relancée, la mort d'un village, le mystérieux professeur Keller, un boxeur amoureux, les nécessités du progrès, le chat Joseph, l'inexorable montée des eaux, une vendeuse aux yeux gris, la confession de l'ingénieur Destouches, un accident de voiture. Et trois histoires d'amour.
Un roman virtuose de Pierre Lemaitre
On ne naît pas féministe, alors comment le devient-on ? Précurseure de l'histoire des femmes, Michelle Perrot, 94 ans, livre ici un magnifique texte à la fois intime et théorique, livre d'histoire et autobiographie. Celle à qui son père conseillait de ne pas se mettre trop tôt un homme sur le dos, qui se rappelle avoir toujours voulu être comme les autres, abolir les différences avec les hommes, aborde son cheminement, de l'engagement chrétien au féminisme en passant par le communisme. Son itinéraire intellectuel, depuis sa thèse où elle voit rétrospectivement un regard presque masculin sur les femmes, donne à voir un siècle de changements sociétaux et la profondeur historique des luttes qui agitent aujourd'hui nos sociétés.
Première historienne à enseigner l'histoire des femmes en France, en 1973, Michelle Perrot nous emmène dans une épopée au féminin en explorant toutes ses ramifications : l'histoire de l'accession à l'égalité, l'histoire du patriarcat, l'histoire du mouvement féministe et des grands débats qui l'ont parcouru et structuré, sur le corps, le genre, l'universalisme contre le différentialisme, la sororité, MeToo. Dans ces pages, la grande histoire se mêle au destin des femmes qui ont porté leur cause et l'on voisine avec Artemisia Gentileschi, Olympe de Gouges, Lucie Baud, Christine Bard, Hubertine Auclert ; l'on dialogue avec Monique Wittig, Arlette Farge, Yvette Roudy, Antoinette Fouque...
La pensée lumineuse de Michelle Perrot, sans rien omettre des sujets les plus épineux, permet de déconstruire et parfois même de dépasser les clivages du féminisme contemporain. Le livre essentiel d'une pionnière, témoin d'un siècle de féminisme, dont l'engagement n'a d'égal que sa hauteur de vue.
Aux marches de l'Empire « à cent têtes et cent corps », sommeille une province minérale et nue où le froid, le givre, les bourrasques semblent ankyloser les habitants d'une bourgade qui ne signalait jusque-là ni notoriété historique, ni intérêt géographique, si ce n'est d'être placée à la frontière « d'un pays dont la bannière se frappait d'un croissant d'or », et dont la vitalité contraste avec l'épuisement ranci du village aux passions tristes.Un jour, le curé est découvert mort. La tête fracassée par une pierre. De quelle nature est le crime ? Qui pouvait en vouloir à ce curé d'une terre où les chrétiens et les musulmans vivaient depuis toujours en bonne entente ? Que faire, qui accuser, et qui entraver dans son action si, à partir de ce meurtre, s'ordonne toute une géométrie implacable d'actes criminels et de cruautés entre voisins ? Il y a un heureux : le Policier, Nourio, car « c'était fabuleux pour lui d'avoir une pareille affaire, dans ce lieu abandonné de toute fantaisie, de tout grain de sable, roulé dans l'ordinaire des jours ». Le voilà lancé dans d'inutiles recherches. À quoi sert de s'opposer au cours impétueux des choses ?Dans ce vieux monde de l'Empire qui s'affaisse, « dans un sommeil épais, s'enroulait dans sa léthargie comme un escargot fainéant bâille dans sa coquille », il y a tous les personnages, en chairs et en vices, qui conviennent au déroulement de la tragédie : chacun joue à merveille sa partition. Nourio, le Policier au teint olivâtre et aux pulsions incontrôlables. Baraj, l'Adjoint dont l'apparence de bête placide et musculeuse dissimule l'âme d'un enfant poète. Lémia, la fillette aux formes adolescentes dont les ombres et les pleins agacent les nerfs du Policier. Tant d'autres, et même les fantômes des temps passés, qui n'ont en commun, dans leur médiocrité âpre et satisfaite, dans le secret de leurs âmes, que d'agir en comparses du grand Effondrement de l'Empire. De suspens en rebondissements, l'intrigue haletante se double d'une grande réflexion sur nos errements contemporains, la volonté de quelques-uns de réécrire l'Histoire, la négation de certains crimes de masse et autres arrangements avec la réalité.
Walter Benjamin, l'un des plus grands mythes intellectuels du vingtième siècle, est toujours parmi nous. Un groupuscule d'extrême gauche porte son nom et réalise des actions militantes énigmatiques, tandis qu'un poète se suicide à la BNF à la suite d'une conférence sur le penseur. Alertés par cette mort étrange, trois spécialistes de Benjamin se lancent à la recherche de son dernier manuscrit. Le trio nous entraîne dans une enquête vertigineuse, véritable labyrinthe de fragments, où à chaque nouvelle page se dessine un peu plus la figure de Walter Benjamin.Roman polyphonique virtuose, Le vingtième siècle donne à penser notre contemporanéité de manière singulière et originale, et à relire l'histoire du siècle passé comme celui dont Benjamin aurait été le héros.
La cour est vide. La maison est fermée. Claire sait où est la clef, sous une ardoise, derrière l'érable, mais elle n'entre pas dans la maison. Elle n'y entrera plus. Elle serait venue même sous la pluie, même si l'après-midi avait été battue de vent froid et mouillé comme c'est parfois le cas aux approches de la Toussaint, mais elle a de la chance ; elle pense exactement ça, qu'elle a de la chance avec la lumière d'octobre, la cour de la maison, l'érable, la balançoire, et le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu.
Années 1960. Isabelle, Claire et Gilles vivent dans la vallée de la Santoire, avec la mère et le père. La ferme est isolée de tous.
?Ils sont frère et soeur. Quand l'histoire commence, ils ont dix-neuf et treize ans.
Cette histoire tient en quelques mots, ceux que la cadette, témoin malgré elle, prononce en tremblant : " Papa vient de tuer maman. " Passé la sidération, ces enfants brisés vont devoir se débrouiller avec le chagrin, la colère, la culpabilité. Et remonter le cours du temps pour tenter de comprendre la redoutable mécanique qui a conduit à cet acte.
Avec pudeur et sobriété, ce roman, inspiré de faits réels, raconte, au-delà d'un sujet de société, le long combat de deux victimes invisibles pour réapprendre à vivre.
Une musique libre et joyeuse s'élève des pages de ce premier roman : celle d'un choeur de femmes saluant la venue au monde de la petite Ève, enfant née d'un désir d'amour inouï.
Stéphanie est cheffe de cuisine, elle voulait être mère, mais pas d'une vie de couple. Elle est allée en Espagne bénéficier d'une procréation médicalement assistée, alors impossible en France. Greg, l'ami de toujours, a accepté de devenir le « père intime » d'Ève. Dans à peine deux semaines, aura lieu la fête en blanc organisée pour célébrer la naissance de leur famille atypique, au grand dam de la matriarche aigrie et vénéneuse qui trône au-dessus de ces femmes.
À l'approche des réjouissances, chacune d'elles est conduite interroger son existence et la place que son corps y tient. Toutes, soeurs, nièces, amies de Stéphanie, témoignent de leur quotidien, à commencer par Ève elle-même, à qui l'autrice prête des pensées d'une facétieuse ironie face à l'attendrissement général dont elle est l'objet. Comme dans la vie, combats féministes, tourments intimes et préparatifs de la fête s'entremêlent.
Camille Froidevaux-Metterie dépeint avec une grande finesse cette constellation féminine, tout en construisant un roman dont les rebondissements bouleversent : rien ne se passera comme l'imaginent encore Stéphanie et Jamila, la nounou d'Ève, s'activant la veille du festin tant attendu.
Tour à tour mordante et tendre, l'écriture, dans sa fluidité et ses nuances, révèle un véritable tempérament d'écrivaine.
«Elle aurait pu renoncer. Elle aurait dû renoncer.Elle se le répéta bien un million de fois toutes les années qui suivirent. Elle eut d'ailleurs une hésitation, peut-être valait-il mieux rester, se rallonger dans la chambrée, à écouter ses deux autres soeurs qui gesticulaient dans leur sommeil, pétaient et miaulaient sous leurs draps à cause de leurs rêves lascifs tout juste pubères. Peut-être valait-il mieux abdiquer, enrager, et se délecter de sa rage, puisqu'il y a un plaisir dans l'abdication, cela va sans dire, le plaisir tragique de la passivité et du dépit, le plaisir du drapage dans la dignité, on ne nous laisse jamais rien faire, on a juste le droit de se taire, on nous enferme, alors que les autres là-bas au loin s'amusent et se goinfrent, qu'est-ce que j'ai fait dans mes vies antérieures pour mériter ça, oh comme je suis malheureuse.Peut-être aussi que le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais le jeu, n'est-ce pas, en vaut rarement la chandelle. Le jeu n'est désirable que parce qu'il est le jeu.»Véronique Ovaldé, à travers l'histoire d'une famille frappée par une mystérieuse tragédie, ausculte au plus près les relations que nous entretenons les uns avec les autres et les incessants accommodements qu'il nous faut déployer pour vivre nos vies.
2021 marque le quatre centième anniversaire de la naissance de Jean de La Fontaine, né à Château-Thierry en juillet 1621.À cette occasion, la Pléiade publie en « Tirage spécial », sous coffret illustré, l'édition de référence des Fables choisies mises en vers, due à Jean-Pierre Collinet (1991), et illustrée, cette fois, des célèbres gravures de Grandville (1838) accompagnées - ce qui n'a jamais été réalisé - des dessins et esquisses du même Grandville, conservés dans le fonds Grandville de la Bibliothèque de Nancy et qui montrent le travail de l'illustrateur, en particulier le jeu auquel il se livre entre représentation animale et représentation humaine des personnages des fables.
« Poésie/Gallimard » est une collection au format poche de recueils poétiques français ou traduits. Chaque volume rassemble des textes déjà parus en édition courante - tantôt du catalogue Gallimard, tantôt du fonds d'autres éditeurs -, souvent enrichis d'une préface et d'un dossier documentaire inédits. Élégant viatique pour les amateurs de poésie, la collection offre des éditions de référence, pratiques et bon marché, pour les étudiants en lettres. Aujourd'hui dirigée par André Velter, poète, voyageur et animateur de plusieurs émissions sur France Culture, la collection reste fidèle à sa triple vocation : édition commentée des « classiques », sensibilité à la création francophone contemporaine (Guy Goffette, Ghérasim Luca, Gérard Macé, Gaston Miron, Valère Novarina...) et ouverture à de nombreux domaines linguistiques (le Palestinien Mahmoud Darwich, le Libanais d'origine syrienne Adonis, le Tchèque Vladimír Holan, le Finnois Pentti Holappa, le Suédois Tomas Tranströmer et récemment l'Italien Mario Luzi, deux mois seulement après sa disparition...).
«J'ai été aimantée par cette double mission impossible. Acheter la maison et retrouver les armes cachées. C'était inespéré et je n'ai pas flairé l'engrenage qui allait faire basculer notre existence.Parce que la maison est au coeur de ce qui a provoqué l'accident.»En un récit tendu qui agit comme un véritable compte à rebours, Brigitte Giraud tente de comprendre ce qui a conduit à l'accident de moto qui a coûté la vie à son mari le 22 juin 1999. Vingt ans après, elle fait pour ainsi dire le tour du propriétaire et sonde une dernière fois les questions restées sans réponse. Hasard, destin, coïncidences? Elle revient sur ces journées qui s'étaient emballées en une suite de dérèglements imprévisibles jusqu'à produire l'inéluctable. À ce point électrisé par la perspective du déménagement, à ce point pressé de commencer les travaux de rénovation, le couple en avait oublié que vivre était dangereux.Brigitte Giraud mène l'enquête et met en scène la vie de Claude, et la leur, miraculeusement ranimées.
Julian a volontairement troqué son job lucratif à la City contre une librairie dans une petite station balnéaire de la côte est anglaise. Mais à peine est-il installé qu'un visiteur surgi de nulle part vient bouleverser sa nouvelle vie : Edward, immigré polonais habitant la vaste demeure en bordure de la ville, semble en savoir beaucoup sur sa famille, et porter trop d'intérêt à la bonne marche de son entreprise.
Lorsqu'une lettre parvient entre les mains d'un haut gradé des Services, l'avertissant qu'une taupe organiserait la fuite d'informations confidentielles, son enquête le conduit jusqu'à cette paisible localité du Norfolk.
Dans L'Espion qui aimait les livres, John le Carré révèle les affres et les doutes des agents secrets, dans l'exercice de leur fonction comme derrière les portes closes de leur foyer. Par-dessus tout, il dénonce comme jamais auparavant les faiblesses du Renseignement britannique. Un roman passionnant, point d'orgue d'une oeuvre grandiose.